Introduction
Le PIB, cet indice – essentiellement économique – qui mesure le développement d’un pays, ça vous parle ? En tous cas, son utilisation pour mesurer la prospérité mondiale est largement critiquée. Et pour cause… saviez-vous qu’avec tout le travail qu’ils donnent à faire, les accidents de la route font augmenter le PIB ? Entre la prospérité économique d’un pays, et le bien-être de sa population, il y a comme qui dirait un fossé.
Mais si "l'argent ne fait pas le bonheur", que faut-il mettre sur la balance pour mesurer le bien-être d'une population ? Et parmi tous les facteurs, quel est l'impact des considérations environnementales sur les statistiques économiques ? La volonté de prospérer sans épuiser toutes les ressources naturelles fait désormais partie des programmes de développement des Etats – au moins dans les discours. Voyons un peu comment les préoccupations écologiques s'intègrent dans les indices des statistiques économiques, comment on passe du PIB au PIB vert, de l'IDH à l'IPE, et tout le reste.
1. Le Produit Intérieur Brut
Tout le monde a appris ça en cours de géographie : l'importance d'un pays se mesure en fonction de son rang économique, qui est déterminé par le montant de son PIB. Le PIB, c'est un indicateur économique créé en 1934 aux Etats-Unis, qui détermine le total des richesses créées annuellement par les différents secteurs d'activités, dans un pays donné. Mais le PIB se décline aussi en PIB mondial : c'est, en dollar, l'addition des PIB nationaux. Cela détermine, en somme, combien la planète a gagné d'argent en un an.
Par extension, nous avons aussi le PIB par habitant, qui détermine le revenu moyen d'un individu selon le pays où il habite, et sert d'indicateur de niveau de vie. Cette évaluation du niveau de vie en fonction de la capacité des habitants à consommer est aussi remise en cause aujourd'hui.
Car beaucoup d'entre nous considèrent en effet que le rang économique d'un pays ne suffit pas à faire état de son niveau de développement par rapport aux autres, et que le pouvoir d'achat ne suffit pas à déterminer la qualité et le niveau de vie des gens. C'est pourquoi le PIB a tenté de s’ouvrir à un peu plus d’humanité.
2. Le PIB Vert
Le PIB Vert est un calcul du PIB revu et corrigé par des chercheurs et ONG, qui prend en compte la "consommation de capital naturel" dans ses calculs. Ainsi, le PIB Vert est le résultat du PIB moins la consommation de capital fixe (Produit Intérieur Net) et la consommation de capital naturel, soit le coût équivalent à la diminution des ressources et aux dommages environnementaux. Difficile de s'imaginer comment calculer un équivalent monétaire de la pollution, pour pouvoir la déduire du PIB… retenons-en au moins que si on compte l'utilisation des ressources et la pollution engendrée, on est déjà beaucoup moins gagnant.
On peut reprocher à cette idée de PIB Vert, ou PINae (Produit Intérieur Net ajusté environementalement), de rester dans une logique très capitaliste, mais il aurait peut-être le mérite d'être plus représentatif de l'économie mondiale que le seul PIB… s'il était mis en application. Dans la pratique, cet indice reste à l'étude et fait l'objet de controverses, faute de méthodes permettant d'évaluer le prix du "capital naturel".
La Chine, qui s'y essaye toutefois depuis 2004, avait calculé que son PIB en 2000 chuterait de 2,25 % s'il tenait compte de l'ajustement environnemental, selon André Gorz, dans le Manifeste Utopia.
3. L'Indice de Développement Humain
L'IDH est un indicateur de bien-être humain fondé sur trois critères : la longévité (espérance de vie à la naissance), le niveau d'éducation (alphabétisation et scolarisation), et le niveau de vie (ou le pouvoir d'achat). L'IDH existe depuis 1990, et il a été mis en place par le PNUD, ou Programme des Nations Unies pour le Développement . Après le PIB, l'IDH réhumanise la mesure de la prospérité des pays. Cela ne signifie pas non plus qu'il soit réellement représentatif du bien-être des populations, car il n'est qu'une moyenne des trois critères choisis parmi d'autres critères non retenus. L'environnement, par exemple, n'est pas pris en compte bien que le développement humain soit conditionné par l'état de l'environnement et de ses ressources, comme on s'accorde aujourd'hui à le dire, notamment avec le fameux concept de développement durable.
4. Les indicateurs environnementaux
Nous avons vu que les méthodes et moyens faisaient défaut pour intégrer les données environnementales dans le calcul de la productivité et de la prospérité des pays. D'où la nécessité de créer des indicateurs environnementaux. C'est à partir de 1992 que l'on a commencé à parler de la mise en place d'indicateurs permettant d'évaluer la situation environnementale d'un territoire, afin de pouvoir considérer la performance environnementale d'un pays par rapport à son activité sociale et économique. Il existe toute une kyrielle d'indicateurs environnementaux, qui se divisent en deux groupes :
– Les indicateurs simples, qui mesurent ce que l'on cherche, mais seulement ce que l'on cherche. Ils permettent avant tout d'obtenir des informations précises, dont les conclusions invitent à une remise en cause des comportement ayant un impact sur l'environnement. Exemple : l'empreinte écologique, le bilan carbone, le profil environnemental, etc.
– Les indicateurs liés, formés sur un nouveau modèle économique développé par l'OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economique), le P-E-R, qui comme son nom l'indique, mais pas de façon limpide, lie plusieurs indicateurs simples de type "Pression", "Etat" ou "Réponse". Les indicateurs de pression permettent d'évaluer l'impact de l'activité humaine sur la nature ; ceux d'état mesurent l'état de l'environnement à un moment donné et sa capacité à absorber et cicatriser des blessures infligées par l'activité humaine. Enfin, les indicateurs de réponse socio-économique visent à aider à la gestion et à la prise de décision, pour la mise en oeuvre d'une préservation du milieu naturel, ou d'une pression qu'elle puisse supporter.
5. L'Indice de Performance Environnementale
En 2006, des chercheurs de l'Université ont créé l'Indice de Performance Environementale. l'IPE classe les pays du monde selon leur capacité à ajuster leur pression environnementale sur la pression soutenable par le milieu naturel, ou autrement dit leur capacité à allier développement économique et préservation du "capital naturel". Cet indice regroupe 25 indicateurs de base regroupés dans les catégories suivantes : santé environnementale, pollution de l'air, ressources en eau, biodiversité, ressources naturelles et changement climatique.
Ainsi, en 2010, L'IPE a classé 163 pays ; la note maximale étant 100, c'est l'Islande qui arrive en premier avec 93,5, suivie de la Suisse (89,1), du Costa Rica (86,4), de la Suède (86), la Norvège (81,1), L'Ile Maurice (80,6) et de la France (78,2), qui doit sa bonne position en partie au fait que l'IPE favorise les pays ayant un programme nucléaire important, qui permet de diminuer le recours aux énergies fossiles…
6. L'Indice de Bonheur Intérieur Brut
24 mai 2011. L'OCDE lance la Better Life Initiative, ou l'Indice de Bonheur Intérieur Brut, en bon français. Le but de cet institut international d'études économiques, depuis 50 ans, est de "promouvoir les politiques qui amélioreront le bien-être économique et social partout dans le monde". Partout… relativisons tout de même, car l'OCDE s'intéresse surtout à ses 34 pays membres, qui comptent parmi les plus industrialisés. Bref, l'organisation a décidé d’expérimenter une nouvelle manière de mesurer la prospérité des pays, qui ne soit pas centrée sur l’argent ; d'où le lancement du BLI, ou IBIB.
Le BLI est un outil statistique intéressant pour les pays concernés, car il prend en compte 11 facteurs de bien-être, où le revenu n'est qu'un parmi les autres, à la différence du PIB par habitant où il est le seul facteur pris en compte, et de l'IDH, où il n'en est qu'un sur trois. Ces 11 facteurs sont : revenus, logement, emploi, santé, sécurité, vie en communauté, gouvernance, éducation, environnement, sentiment de satisfaction personnelle et équilibre entre vie professionnelle et vie de famille.
Sur le site interactif du BLI, l'internaute peut accéder à de nombreuses données qu'il peut comparer entre elles de façon simple et plaisante. Le BLI ne classe pas les pays de façon générale, mais seulement par facteur de bien-être, pour chacun desquels il donne des notes entre 1 et 10. Le résultat reste ainsi nuancé, et plus représentatif qu'une moyenne générale. On peut consulter les données par pays ou par facteur, et comparer les uns aux autres.
Pour conclure, choisissons tout à fait au hasard de vous communiquer le top 10 des pays qui, selon les études de l'OCDE, ont la meilleure qualité environnementale : Suède (10), Nouvelle-Zélande (9,7), Irelande (9,6), Estonie, Luxembourg, Royaume-Uni, France (9,5), Slovaquie (9,4), Australie et Islande (9,2).
+ d'infos : OECD Better Life Initiative
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