Introduction
Quand on entend parler de commerce équitable, on pense immédiatement à souvent exploités par une société consumériste qui ne les considère même pas. De grandes marques ont bâti leur réputation sur le commerce équitable, comme Etiquable ou Alter Eco. Quant au respect de la nature, il va plus souvent de pair avec l’agriculture biologique : sans engrais ni pesticides, elle laisse la vie se développer sous terre ou en surface, rendant la terre meilleure, et avec elle ce qui y pousse. Si cette opposition entre agriculture bio et commerce équitable vous surprend, il faut bien savoir qu’aujourd’hui, la moitié des produits équitables sont bio.
Si vous en avez l’occasion, le film de Coline Serreau ("Solutions locales pour un désordre global") contient une séquence édifiante, où sont comparées deux portions de terre : l’une prélevée dans le champ d’un agriculteur "productiviste", l’autre à la lisière d’une forêt, non exploitée. Dans l’une, rien que de la terre compactée à un point tel qu’elle en a une apparence minérale, de l’autre, une matière aérée et humide, avec des dizaines d’insectes qui la parcourent. L’une se fiche pas mal de la vie, l’autre la préserve. La même comparaison sera faite plus tard avec une portion de terre "bio", pour un résultat identique. Alors, le bio unique protecteur de la biodiversité ? Plus maintenant.
1. La biodiversité outragée, la biodiversité brisée, la biodiversité martyrisée, mais la biodiversité libérée ?
Commençons ce chapitre comme un discours de remise d’Oscar peu inspiré : Le dictionnaire définit la biodiversité comme "la diversité des espèces présentes dans un milieu".
Voilà. Cela inclue les espèces animales comme végétales. Et l’une comme l’autre sont irrémédiablement menacée dès que l’Homme commence une activité, dans quelque région de la planète que ce soit. Nous en appelons pour preuves au chiffre qui fait peur : la disparition des espèces est aujourd’hui 1000 à 10000 fois supérieur au rythme d’extinction naturelle.
Tout autant que l’extinction, l’uniformisation des espèces est des plus inquiétantes. Dans certaines zones, l’Homme est ainsi arrivé à force d’activités agricoles à uniformiser les espèces végétales, et donc les espèces animales qui gravitent autour. L’exemple le plus simple et le plus extrême étant les plantations de dizaines de milliers d’hectares de palmiers en Indonésie, producteurs d’huile de palme. Une monoculture qui entraîne petit à petit la disparition de l’orang-outan de cette région du monde.
Ce que les industriels semblent oublier, c’est que s’il existe des insectes et autres animaux spécifiques à certains environnements, que si toutes ces espèces sont présentes depuis des siècles, ce n’est pas pour rien. Il existe une logique. Les vers de terre servent à aérer les sols, des animaux se nourrissent de mauvaises herbes, quand les insectes s’occupent de polléniser et d’assurer la reproduction végétale… Le genre de choses qu’un enfant de 12 ans saurait.
Puisque l’on ne peut définitivement pas compter sur les grands groupes agro-alimentaires, ce sont les acteurs du commerce équitable qui prennent aujourd’hui en compte le paramètre de la biodiversité. Un petit coup d’oeil sur deux exemples sud-américains, en espérant qu’ils influencent leurs collègues qui produisent à plus grande échelle.
2. Quatre exemples parlants
Au Mexique, dans la région du Chiapas, la coopérative Comon Yaj Nop Tic (à vous souhaits) a pris les choses en main. Créée par des producteurs de café dans la réserve de biosphère El Triunfo, elle finance des formations qui sont dispensées aux familles sur les méthodes d’agriculture respectant les engagements environnementaux du commerce équitable.
Même région, autre coopérative équitable : l’organisation Campesinos Ecologicos de la Sierra Madre de Chiapas (la CESMACH) fondée en 1994 travaille depuis pour le développement de son activité dans le respect de son environnement. Résultat, le gouvernement mexicain lui remet en 2003 le "prix du mérite environnemental pour ses efforts en faveur de la protection des espèces végétales en danger dans leur zone de production". On vous laisse imaginer la taille du trophée, étant donnée la longueur de l’intitulé.
Troisième exemple du Chiapas : une coopérative d’apiculteurs (Mieles del Sur, pour ceux que ça intéresse) composée de 150 producteurs a participé à un programme du gouvernement mexicain qui offrait une ruche à chaque apiculteur pour 25 arbres plantés. Ils ont participé à la reforestation de leur habitat, mais aussi à son développement. Qui dit "abeilles" dit "pollinisation" et "survie des espèces végétales", surtout dans des zones où la forêt atteint parfois une densité qui rend la pollinisation impossible par le vent, et où elle ne peut compter que sur les espèces animales et les insectes pour se développer.
Autre produit du commerce équitable, de plus en plus à la mode, et donc de plus en plus consommé : la quinoa. Des producteurs boliviens regroupés ont fait appel à une organisation internationale (en l’occurrence Agronomes et Vétérinaires sans Frontières). La conclusion de cette collaboration a été simple : la biodiversité doit être prise en compte dans les procédés d’agriculture employés, les plantations dans les forêts primaires (de plus en plus rares) sont interdites, et la diversification des cultures dont nous parlions en page précédente est encouragée.
Tout ceci n’était bien sûr qu’une infime partie des engagement pris de par le globe pour la sauvegarde de la biodiversité dans une logique paradoxalement productiviste. N’hésitez pas à nous faire partager d’autres initiatives de ce genre si le coeur vous en dit.
commentaires