El Hierro, 278 m2, 10700 habitants, est la plus petite île de l'archipel des Canaries. Ce petit coin de Terre qui figure sur la liste des 550 réserves de biosphère de l'Unesco depuis 2001, était déjà très soucieux d'allier son développement économique avec la protection de la nature, ne serait-ce que parce qu'elle y est magnifique, mais aussi parce que c'est elle qui fait marcher le tourisme. Quoi qu'il en soit, l'île sera bientôt en mesure de produire elle-même l'intégralité de son énergie grâce à une centrale hydrolienne, et montrera le bon exemple à ses camarades terriens. Petit mais costaud, l'îlot.
A l'heure actuelle, il dépend encore de sa centrale au fioul, dont la matière première est livrée par bateau ( 6000 tonnes de pétrole brûlées par an). La centrale hydrolienne de Gorona del Viento, qui fonctionnera dès 2012 après une période de rodage fin 2011, a été développée pour utiliser de façon optimale les deux ressources d'énergie renouvelables omniprésentes sur l'île : le vent et l'eau.
L’investissement s’élève à 65 millions d’euros, dont 35 millions viennent du gouvernement espagnol : cinq éoliennes d'une puissance totale de 11,5 mégawatts – 64 mètres de haut et 35 mètres d'envergure chacune – répondront aux besoins en électricité de la population et de toutes les activités économiques de l'île. Mais la capacité des éoliennes correspond au triple de ses besoins permanents : elle est prévue assurer la consommation supplémentaire des 60 000 touristes qui visiteront annuellement El Hierro pendant leurs vacances.
Et lorsque la production d'électricité dépassera la consommation de l'île et ses touristes, l'excédent sera stocké grâce à un savant système de pompage-turbinage : une réserve d'eau dans un bassin artificiel de 150 000 m3 sera acheminée jusqu'à un second bassin de 550 000 m3 (voir photo), situé 700 mètres plus haut, au pied des éoliennes. En cas de panne de vent (ce qui n'arrive que très rarement), un lâcher d'eau du réservoir supérieur permettra d'alimenter 6 turbines hydrauliques d'une puissance totale de 11,3 mégawatts. Grâce à cette centrale, l'énergie éolienne passera donc, pour la première fois de l'histoire, du statut d'intermittente à celui de permanente.
Les responsables du projet comptent même sur l'excédent d'électricité pour faire tourner une usine de dessalement de l'eau de mer pour l'irrigation des cultures. Le programme de développement durable d'El Hierro est complet : c'est toutes les activités humaines qui sont conçues en harmonie avec l'écosystème. Pour ne citer que l'exemple de l'alimentation, les autorités se sont mis d'accord avec les agriculteurs, les restaurateurs et les cantines : avant 2020, toute la nourriture locale sera biologique. Mais il y a aussi le réseau de recyclage, l'introduction d'espèces protégées dans les bassins artificiels, la protection des côtes, notamment par le refus du tourisme de masse… évitons donc de trop l'encenser, sinon tout le monde voudra y aller. Mais le futur El Hierro ressemble un peu au village des schtroumpfs, non ?
Difficile, cependant, d'imaginer arriver aussi vite à de tels résultats avec un pays comme la France – presque 2000 fois plus grand. Et tout le monde n'a pas la mer et le vent à portée de main. Ce dont le monde peut s'inspirer, c'est du principe : arriver à se mettre tous d'accord pour s'organiser un mode de vie qui ne porte pas atteinte au bien commun.
+ d'infos : Gorona del Viento
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